Le Conseil Consitutionnel déclare non conforme la liste spéciale d’avocats en matière de terrorisme

Le Conseil Consitutionnel déclare non conforme la liste spéciale d’avocats en matière de terrorisme

L’article 16 de la loi n°2011-392 du 14 avril 2011 a institué dans notre code de procédure pénale un nouvel article 706-88-2, lequel disposait jusqu’à aujourd’hui:

« Si la personne est gardée à vue pour une infraction mentionnée au 11° de l’article 706-73 [soit en matière de terrorisme], le juge des libertés et de la détention, saisi par le procureur de la République à la demande de l’officier de police judiciaire, ou le juge d’instruction lorsque la garde à vue intervient au cours d’une instruction, peut décider que la personne sera assistée par un avocat désigné par le bâtonnier sur une liste d’avocats habilités, établie par le bureau du Conseil national des barreaux sur propositions des conseils de l’ordre de chaque barreau. »

Ainsi, en matière de terrorisme, la personne gardée à vue pouvait se voir désigner son avocat.

Par décision de ce jour, le Conseil Constitutionnel a déclaré non conforme cette nouvelle disposition du code de procédure pénale.

Dans un premier temps du raisonnement, le Conseil constitutionnel a jugé que « la liberté, pour la personne soupçonnée, de choisir son avocat peut, à titre exceptionnel, être différée pendant la durée de sa garde à vue afin de ne pas compromettre la recherche des auteurs de crimes et délits en matière de terrorisme ou de garantir la sécurité des personnes » (cons. 7). Une telle atteinte, dont le Conseil souligne qu’elle ne peut intervenir qu’à titre « exceptionnel », n’est donc pas, par elle-même, contraire à la Constitution. Le Conseil précise toutefois qu’il « incombe au législateur de définir les conditions et les modalités selon lesquelles une telle atteinte aux conditions d’exercice des droits de la défense peut-être mise en oeuvre » (cons. 7).

C’est sur ce point que le Conseil constitutionnel constate un cas d’incompétence négative, en relevant que « les dispositions contestées se bornent à prévoir, pour une catégorie d’infractions, que le juge peut décider que la personne gardée à vue sera assistée par un avocat désigné par le bâtonnier de l’ordre des avocats sur une liste d’avocats habilités établie par le bureau du Conseil national des barreaux sur proposition des conseils de l’ordre de chaque barreau ». Le Conseil relève une double insuffisance de la loi en ce que ces dispositions « n’obligent pas à motiver la décision ni ne définissent les circonstances particulières de l’enquête ou de l’instruction et les raisons permettant d’imposer une telle restriction aux droits de la défense » (cons. 7).

Au regard de ces éléments, le Conseil constitutionnel a estimé « qu’en adoptant les dispositions contestées sans encadrer le pouvoir donné au juge de priver la personne gardée à vue du libre choix de son avocat, le législateur a méconnu l’étendue de sa compétence dans des conditions qui portent atteinte aux droits de la défense » (cons. 7).

Commentaire de la décision n° 2011-223 QPC du 17 février 2012, page 10

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