« Malgrés-nous » : la fin d’une discrimination entre incorporés de force

« Malgrés-nous » : la fin d’une discrimination entre incorporés de force

Durant la seconde guerre mondiale, l’Alsace Moselle a été de fait purement et simplement annexée par le IIIe Reich et intégrée aux Gau (régions) de la Sarre (pour la Moselle) et du Pays de Bade (pour l’Alsace).

Si au début de la guerre les nazis ont eu des scrupules à integrer dans la Wehrmacht et la SS les jeunes alsaciens mosellans en âge de combattre, ceux-ci étant nés français et ayant fait toute leur scolarité sous le regime français, ces appréhensions ont disparu à l’été 1942 face aux saignées du front de l’est.

Ainsi, de 1942 à 1945 130 000 jeunes alsaciens mosellans ont été contraints d’intégrer l’armée allemande, les récalcitrants étant envoyés en camp de redressement (« camp de Schirmeck », de sinistre mémoire) ou dans des bataillons disciplinaires, les déserteurs fusillés et les parents des éxilés (en Suisse ou en France libre) déplacés en Allemagne profonde et tous leurs biens vendus.

Soldats contraints de se battre pour un pays qui n’était pas le leur, l’Allemagne nazie a jugé plus sûr de les envoyer sur le front russe où l’on manquait au demeurant de chair à canon. Environ 13 000 alsaciens mosellans capturés par les soviétiques ont été regroupés dans un camp de prisonnier à Tambov à 500 kms au sud-est de Moscou. Les conditions de vie régnant dans ce camp (comme dans tous les camps de prisonniers soviétiques) étant particulièrement rudes (sous-alimentation, hygiène déplorable, maladies, froid,…), beaucoup y ont laissé leur santé, voire leur vie.

Les alsaciens mosellans rentrés au pays dont l’invalidité avait pour origine leur séjour à Tambov ont été indemnisés par l’Etat français (20 ans plus tard). Par contre, ceux qui ont eu la malchance d’être fait prisonniers par les soviétiques sans être transférés à Tambov, n’ont pas eu droit au même traitement. Pourquoi ?

La réponse se trouve dans le décret n° 2013-105 du 29 janvier 2013 modifiant le décret n° 73-74 du 18 janvier 1973 déterminant les règles et barèmes pour la classification et l’évaluation des invalidités résultant des infirmités et maladies contractées par des militaires ou assimilés au cours de la captivité subie dans certains camps ou lieux de détention.

Ce décret met fin à une discrimination manifestement sans fondement, ouvrant l’évaluation des invalidités à tous les militaires ou assimilés ayant été captifs dans un « camp sous contrôle de l’armée soviétique » (et non plus seulement à Tambov).

Il était plus que temps : les plus jeunes avaient 16/17 ans en 1945. Cette réforme vise donc, au mieux, des invalides qui ont 84 ans aujourd’hui. Il ne doit plus en rester beaucoup.

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