Garde à vue en matière de terrorisme : la déclaration de guerre du gouvernement aux avocats

Garde à vue en matière de terrorisme : la déclaration de guerre du gouvernement aux avocats

En dépit des très vives protestations exprimées par le Barreau par la voix notamment de ses instances représentatives, le gouvernement est resté inflexible : le décret n°2011-1520 du 14 novembre relatif à la désignation des avocats pour intervenir au cours de la garde à vue en matière de terrorisme est paru au J.O. du 15 novembre.

N’ayons pas peur des mots : ce texte est une honte et une véritable déclaration de guerre faite aux avocats, notamment dans le contexte plus général de la place de l’avocat en garde à vue. On croyait avoir tout vu en matière de suspicion à l’égard de notre profession avec le décret anti-blanchiment du 26 juin 2006, d’ailleurs partiellement annulé par le Conseil d’Etat… Pourtant une telle défiance à l’égard des avocats, matérialisée dans un texte réglementaire, est sans précédent.

Rappelons que ce texte – d’ores et déjà mort-né et qui prendra rapidement place au Panthéon des « décrets scélérats » – a été adopté sur le fondement de l’article 706-88-2 du CPP issu de la loi du 14 avril 2011 relative à la garde à vue, qui prévoit que le JLD ou le juge d’instruction peuvent, si une personne est gardée à vue pour des faits de terrorisme, décider que cette personne sera assistée par « un avocat désigné par le bâtonnier sur une liste d’avocats habilités établie par le bureau du Conseil national des barreaux sur propositions des conseils de l’Ordre de chaque barreau ».

Le décret du 14 novembre précise les modalités d’établissement de la liste des avocats pouvant être désignés pour intervenir au cours de la garde à vue en matière de terrorisme. Ne pourront figurer sur la liste que les avocats inscrits au tableau depuis plus de cinq ans, ce qui en soi est une mesure de défiance et une discrimination à l’égard des Jeunes Avocats.

Chaque conseil de l’Ordre est supposé transmettre au CNB les noms des avocats proposés au moins deux mois avant la fin de l’année civile. Le nombre des avocats proposés par chaque barreau ne peut ni excéder 10 % du nombre des avocats inscrits au tableau ni être inférieur à trois. Un conseil de l’Ordre pourra demander au ministre de la justice une dérogation, pour obtenir un seuil maximal supérieur, fondée sur les « spécificités du contentieux pénal local ».

A partir des éléments qui lui seront parvenus, il appartiendrait au bureau du Conseil national des barreaux d’arrêter la liste nationale des avocats habilités pour une durée de trois ans et de la communiquer avant le début de l’année civile à l’ensemble des bâtonniers et des chefs de juridiction.

L’article 2 du décret du 14 novembre 2011 prévoit, au titre de la période transitoire, que la première habilitation des avocats inscrits sur la liste prend effet du 1er avril 2012 au 31 décembre 2014. Chaque conseil de l’Ordre est supposé transmettre au Conseil national les noms des avocats proposés avant le 31 janvier 2012. Il appartiendrait ensuite au Conseil national de diffuser la liste nationale avant le 31 mars 2012.

La FNUJA appelle la profession, le CNB et l’ensemble des Conseils de l’Ordre à la résistance face à de telles dispositions qui contreviennent au principe du libre choix de l’avocat et posent en germe un exercice discriminatoire de la profession d’avocat.

Les Jeunes Avocats mèneront tous recours contre la totalité des dispositions critiquées.

COMMUNIQUE DE LA FNUJA 17 Novembre 2011

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