La réforme de la carte judiciaire : une réforme ratée

La réforme de la carte judiciaire : une réforme ratée

En 2007, lors de la campagne des présidentielles, Nicolas Sarkozy avait annoncé qu’il fallait absolument revoir la carte judiciaire des tribunaux français. Tout le monde était d’accord. Résultat, une réforme consensuelle qui aurait pu être menée à la satisfaction de tous s’est transformée en un véritable fiasco car, une fois élu, Nicolas Sarkozy a effectivement revu la carte judiciaire mais sans consulter qui que ce soit (juges, avocats, greffiers ou justiciables). La réforme a ainsi été menée de Paris au mépris des réalités locales.

En Nord-Alsace cette réforme ubuesque s’est concrétisée par la disparation des tribunaux d’instance de Brumath et Wissembourg qui ont dû fusionner avec celui de Haguenau.

La réforme s’étant faite dans la précipitation et sans la moindre concertation, à Haguenau il a fallu trouver en urgence des locaux pour accueillir les personnels et dossiers en provenance de Brumath et Wissembourg. Tout a été envisagé : occuper des locaux militaires désaffectés, déposer des préfabriqués sur un terrain vague le long de la voie ferrée, … Et pourquoi pas louer une péniche sur la Moder tant qu’on y est ? Face au ridicule de la situation et au manque manifeste de locaux disponibles, les services judiciaires ont finalement décidé d’entasser tout le monde dans les anciens locaux du tribunal d’instance de Haguenau, au besoin en mettant 4 greffiers par bureau.

Le plus surprenant est qu’au départ les tribunaux d’instance n’étaient pas vraiment concernés par la réforme. C’étaient surtout les tribunaux de grande instance faisant doublons qui étaient visés, notamment en Alsace ceux de Strasbourg et Saverne ou, dans une moindre mesure, ceux de Colmar et Mulhouse. Toutefois, face aux levers de boucliers locaux, le Ministère de la Justice a reculé et s’est finalement rabattu sur les tribunaux d’instance dont les élus locaux sont beaucoup moins remuants, voire carrément soumis. Brumath en est un bon exemple.

Ainsi, par un tour de passe-passe, les tribunaux de grande instance qui devaient initialement disparaître se sont presque tous maintenus, alors que les tribunaux d’instance (qui étaient à ce jour encore les seuls tribunaux à fonctionner à peu près normalement avec des délais relativement courts et respectés) se sont trouvés à devoir fusionner en urgence.

La catastrophe n’est pas loin. A Haguenau par exemple, les justiciables se retrouvent aujourd’hui avec des audiences où jusqu’à 140 dossiers sont appelés en même temps, soit des heures d’attente. Les salles d’audience sont bondées et les délais largement dépassés, sans parler des kilomètres supplémentaires que doivent effectuer les justiciables, notamment depuis Wissembourg.

Et dire que l’ensemble de cette réforme a été menée sous un prétendu souci d’efficacité et d’économie. On pourrait en rigoler si le même drame ne se jouait pas dans les hôpitaux, l’éducation nationale, Pôle Emploi, la police, l’armée, … bref tout ce qui fait qu’un État existe et fonctionne.

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