Le conseil constitutionnel
Chronique mars 2010
Radio Judaica 102,9 FM Strasbourg
Entretien entre Mme VIAL, journaliste, et Me BUFFLER, avocat
Mme VIAL : Me BUFFLER, 3 des 9 membres du conseil constitutionnel viennent d’être renouvelés ? Quel est le rôle exact du conseil constitutionnel ?
Me BUFFLER : le conseil constitutionnel est la juridiction de droit commun en matière de contentieux électoral mais, surtout, est chargé du contrôle des lois. Il faut savoir en effet que, quand bien même le Parlement est souverain et légifère au nom du peuple français, il n’est toutefois pas totalement libre d’adopter n’importe quel texte, n’importe quelle disposition.
Des textes de valeur supérieure s’impose à lui. Il s’agit bien évidemment de la Constitution, adoptée en 1958 pour ce qui est de la Ve république, mais pas seulement. Le Parlement, et donc les lois, doivent également respecter la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 ou la Charte de l’environnement.
Si un texte de loi soumis au conseil constitutionnel est jugé par ce dernier inconstitutionnel alors ce texte ne pourra jamais entrer en vigueur.
Cela a été récemment le cas pour ce qui de l’instauration d’une « taxe carbone » sur les énergies polluantes. Le conseil constitutionnel a estimé que les exemptions au paiement de cette taxe étaient telles qu’il y avait rupture au principe d’égalité des citoyens devant la loi, principe édicté dans la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789.
Mme VIAL : qui peut saisir le conseil constitutionnel ?
Me BUFFLER : au départ, seuls le Président de la République, le Premier Ministre, les Présidents de l’Assemblée Nationale et du Sénat pouvaient le saisir.
Depuis 1974 au minimum 60 sénateurs ou députés peuvent également le faire. Le plus souvent ce sont 60 sénateurs ou députés de l’opposition, mécontents du texte adopté par la majorité, qui le saisissent.
Cette saisine ne peut intervenir qu’après le vote de la loi contestée mais, surtout, elle doit impérativement se faire avant que le Président de la République ne la promulgue, c’est-à-dire avant qu’il ne signe le texte de loi. Après c’est trop tard, le conseil constitutionnel ne peut plus rien faire, quand bien même le texte serait manifestement contraire à la Constitution.
Mme VIAL : dans de nombreux pays, notamment aux États-Unis ou en Allemagne, le simple citoyen peut contester la constitutionnalité d’une loi. Ce recours est donc impossible en France ?
Me BUFFLER : c’est la grande nouveauté de l’année 2010 : depuis cette année à l’occasion d’un procès le justiciable a le pouvoir de soulever l’inconstitutionnalité de la loi qu’on lui oppose. Précédemment cela était strictement impossible.
En pratique, aujourd’hui, le justiciable qui estime que la loi qu’on lui oppose est inconstitutionnelle va demander au juge saisi de son affaire de transmettre ses doutes à la Cour de cassation ou au Conseil d’Etat (selon la matière) qui eux-mêmes, s’ils estiment les doutes du justiciable sérieux, vont transmettre ces doutes au Conseil constitutionnel qui rendra alors, et alors seulement, sa décision.
En d’autres termes, pas de recours direct auprès du Conseil constitutionnel.
Mme VIAL : merci Me BUFFLER et à la semaine prochaine pour un nouvel éclairage sur l’actualité juridique.
NB : pour la question prioritaire de constitutionnalité, vous pouvez consulter le site officiel trés clair et bien documenté du Conseil constitutionnel (notamment le tableau des dispositions déclarées conformes à la Constitution par le Conseil constitutionnel) à l’adresse : http://www.conseil-constitutionnel.fr/conseil-constitutionnel/francais/l…